Il y a encore des juges à Bruxelles...
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Le matin même du 11 mars, la RTBF Première nous annonçait avec une impatience
non-dissimulée l'imminence du prononcé du jugement sur (elle pensait contre) l'Eglise de
Scientologie. C'était clair : on allait enfin lui régler son compte. Je dois avouer qu'intoxiqué
par le tir de barrage médiatique, je m'attendais au pire.
Le jugement de relaxe m'a rempli de joie, non pas par admiration pour la doctrine et
l'action de cette Eglise, mais pour la liberté de conscience et d'expression. On avait fini par
croire qu'elle n'était plus de saison hors des Etats-Unis.
Les juges de la 69ème chambre du Tribunal correctionnel de Bruxelles méritent respect
et même admiration. Ils ont résisté parfaitement aux inepties montées par la presse dans
plusieurs pays dont le nôtre, en inventant un concept, celui de "secte", dépourvu de tout
fondement, indéfinissable autrement que comme "groupe de type religieux qu'on n'aime
pas". Même les délits non-religieux, comme des infractions au droit du travail, portés par
l'accusation n'avaient pas le moindre fondement ! Les attendus du jugement sont clairs,
intelligents et mortels pour l'accusation : "les prévenus ont d'abord été poursuivis parce
qu'ils sont des adeptes de la scientologie... cet a priori a été de nature à obliger les
prévenus à défendre la doctrine à laquelle ils ont adhéré" (Le Soir des 12-13 mars 2016).
Au Parquet, on ne lit pas la Constitution ou même pire : on n'en veut pas. Quant à la
RTBF, après le prononcé, elle était des plus contournées. Pensez, un simple juge se croit
permis de la contrarier.
La France n'est pas mieux lotie mais là aussi certains commencent à réfléchir. On y a
aidé des projets aussi fumeux que la transposition de la lutte anti-sectes à la lutte contre
les djihadistes (ceux qu'on n'aime pas, on les traite comme des malades et ça ne fait pas
sursauter). La "spécialiste" de la question s'appelle Dounia Bouzar.
Son "Centre de prévention contre les dérives sectaires liées à l'islam" recevait une
subvention de 600.000 €. La sénatrice Nathalie Goulet a fini par constater que les
résultats annoncés n'étaient que du vent et Dounia Bouzar a préféré renoncer (Marianne,
site le 25 février 2016, sous le titre "La déradicalisation fait un bide").
Posons le problème qui ne l'est pas (1).
Il aura fallu l'attentat du 13 novembre à Paris pour qu'on retire des missions centrales de
la Sûreté belge la chasse aux "sectes" (Le Soir du 20 novembre 2015).L'instruction contre
la Scientologie a duré près de vingt ans et a occupé un procureur et des policiers alors
que le procureur de Bruxelles ne cesse de réclamer des magistrats en plus.
Qui va répondre des moyens ainsi soustraits à la solution du vrai problème, les
attentats djihadistes ?
La Belgique en a connu un et à Paris, les Belges étaient vraiment là.
Evidemment les sectes n'ont pas de kalachnikov et engager des enquêteurs qui
connaissent l'arabe, du fait de leur origine ou par apprentissage, ne fait sans doute plaisir
ni aux policiers en place ni aux hommes politiques qui n'aiment pas ces corps étrangers.
On fait le silence sur ces énormes erreurs et demander des comptes ne servira à rien :
tous sont coupables, du ministre à l'inspecteur de police.
Mais on pourrait se corriger. Notre gouvernement fédéral cherche désepérément des
économies à réaliser. Ce n'est pourtant pas compliqué : qu'attend-on pour dissoudre le
CIAOSN, le Centre fédéral belge d'information et d'avis sur les sectes nuisibles ? Il n'est
même pas inutile : c'est lui qui est nuisible.
Et pour le budget de la Fédération Wallonie-Bruxelles, j'ai aussi une suggestion.
Sur son site, l'asbl Aviso du député André Frédéric, spécialisée dans la lutte contre les
"sectes", annonce qu'elle est financée par la Fédération.
Patrice Dartevelle
(1) Inutile de redire ce que j'ai dit dans " Le Pape François : qui suis-je pour dire que tu es
une secte?", Bulletin de la LABEL N° 54 (2015), consultable sur blaspheme.be.