Bulletin Numéro 41 - Nous savons à quoi nous attendre
NOUS SAVONS A QUOI NOUS ATTENDRE
L’acquittement du Père Samuel par la 10e chambre correctionnelle du Tribunal de Charleroi le 26 septembre ne peut que me confirmer dans mes craintes.
Le Père Samuel était poursuivi par le Centre pour l’Égalité des Chances pour des passages de son ouvrage Les versets angéliques, et des propos tenus dans des reportages de la RTBF et dans Le Soir (1). Il s’agit de choses comme « Chaque mosquée est une bombe nucléaire en puissance », « Chaque enfant musulman bien islamisé est une bombe pour l’Occident ».
Le tribunal relève clairement que le Père Samuel ne fait intervenir « aucun critère d’origine ethnique, de race ou de couleur ». Il s’agit donc bien d’une attaque contre une religion, comme nos bibliothèques en sont pleines.
En fait, le Tribunal correctionnel de Charleroi a besoin d’une telle analyse pour acquitter le Père Samuel. Il établit bien qu’au moment des faits, c’est-à-dire avant la loi de 2007, il n’y avait pas de poursuites possibles pour de tels faits.
Le Centre pour l’Égalité des Chances est sorti heureux de l’audience, ce qui est logique de son point de vue.
Religions et fidèles
L’argumentation du tribunal indique bien le tour de passe-passe des plus aisés nécessaire pour activer la loi de 2007 à tous les coups.
Le Père Samuel s’en prend à l’islam mais comment peut-il le faire sans jamais s’en prendre à leur concrétisation, les fidèles de l’islam, donc les musulmans.
Qui s’en est pris au nazisme et au communisme sans jamais attaquer les nazis et les communistes ?
C’est le procédé hautement prévisible qui fait que les articles concernés de la loi du 10 mai 2007 tiennent aisément lieu de loi réprimant le blasphème.
Les idées et les pratiques du Père Samuel ne m’inspirent aucune sympathie et l’ai écrit autrefois dans un article qui visait en fait surtout la caution donnée au personnage par Jean-Claude Van Cauwenberghe (2).
Mais cela ne fait rien à l’affaire : la tolérance c’est de ne pas permettre d’atteinte à la liberté et à l’intégrité de celui qui tient des propos que l’on juge parfaitement abominables.
Tout le reste relève de l’intolérance.
L’aveu néerlandais
Il y a mieux encore dans l’actualité récente quant au mécanisme de substitution de lois exigeant le respect des religions à celles réprimant le blasphème.
Le Premier Ministre hollandais, Jan Peter Balkenende, a annoncé le 31 octobre que son gouvernement allait supprimer du code pénal la loi sur le blasphème, tout comme l’Angleterre l’avait fait en mars 2008 dans un contexte similaire. Il en donne explicitement la raison : « … les dispositions légales relatives au racisme, à la discrimination religieuse ou aux appartenances religieuses, sexuelles ou philosophiques sont suffisantes… » (3).
Le quotidien chrétien progressiste Trouw est plus cru encore : « Il est temps que l’animosité entre les chrétiens et les laïcs néerlandais cède sa place à la reconnaissance des différences dans un monde multiforme » (4).
Bref, on est passé de l’intolérance pour protéger le plus fort à l’intolérance généralisée sans passer par la liberté.
Trouw continue en donnant la plus mauvaise des justifications à sa position : « La liberté ne comprend pas le droit à l’injure. Mais il n’y a heureusement pas non plus de droit à la protection contre les injures ». Mais tout blasphème peut être qualifié d’injure. Dans l’optique ancienne, c’est une injure à Dieu et à la religion. On ne change rien en disant que c’est une insulte à l’égard des croyants. L’intolérance a encore de beaux jours devant elle. Ses partisans ont compris qu’il fallait changer pour que rien ne change…
Patrice Dartevelle
1. Le Soir des 27 et 28 septembre 2008.
2. « Le Wallon et le goupillon », Espace de Libertés, n° 297 (janvier 2002), p. 28.
3. D’après une dépêche Cathobel du 3/11/2008.
4. D’après Eurotopics du 3/11/2008.